Le prince emmena Likjam dans un vestibule minuscule, rond et sombre, décoré d'arabesques. Au centre, un petit pilier sur lequel trônait une boule de cristal. Le prince montra la sphère du doigt, et dit :
" Vois."
En observant à l'intérieur, le mercenaire vit effectivement l'image floue d'Igor en train de monter des escaliers. Un Igor bien vivant.
" Je ne comprends pas. Il est pourtant tombé, je l'ai vu...
- Mais il est toujours là.
- Oui."
N'importe quel autre soldat dans cette situation se serait senti honteux, incapable, indigne. Pas lui. Il respira un bon coup puis il rétorqua :
" De toute façon, j'ai réussi ma mission, non ? Vous vouliez qu'il disparraisse. Je l'ai fait disparaitre. Il est réapparu tout seul. Maintenant, je ne veux rien d'autre que ma paye.
- Tu as échoué, mercenaire.
- Je... réclame... ma... paye ! jura-t-il en serrant les dents.
- Si j'ai donné une seconde chance au sorcier Tuberculoz, répondit le commanditaire sans bouger, c'était parce que j'avais encore besoin de lui. Son énergie m'est précieuse. Ce qui n'est plus ton cas. Pars sur-le-champ. Avant que je ne devienne moins clément.
- Je veux... MA RECOMPENSE !"
Furieux, il dégaina sa rapière hargneusement, et dans son mouvement, il brisa la boule de cristal en mille morceaux. Il tenta de trancher le prince de haut en bas mais ce dernier arrêta l'épée avec sa main gauche, d'un coup, tranquilement, sans même se couper. Dans un bras de fer au ralenti, ils poussèrent l'épée chacun de leur coté : l'un voulait récupérer son arme et l'autre la lui arracher. Quelques secondes après, le fleuret fut jeté à terre. Aprés, tout se passa très vite...
Lassé de son insolence, le prince saisit Likjamà la gorge. Il le regarda dans le blanc des yeux et serra un peu plus fort, ensuite il le porta à bout de bras jusqu'à la fenêtre, lentement, et le laissa tomber.
Dehors, c'était le crépuscule. De loin, on voyait juste une silhouette maigre qui chutait du haut d'une tour, sur fond orange. Mais Likjam était bien décidé à ne pas mourir comme ça. Il voyait le paysage autour de lui remonter alors que lui descendait. Tomber, ça ressemblait trop à un suicide. Et un suicide, c'est lâche. Likjam n'était pas lâche. Il allait lui montrer, à ce prince... D'abord, il fit une pirouette aérienne pour se redresser. Après quoi, il ouvrit les doigts et avec un flash lumineux, sa rapière se rematérialisa dans la main. Ensuite, comme dans tous les films d'actions, il planta sa flamberge dans le mur jusqu'à ce que sa chute s'arrête progressivement. Et voilà. Il n'avait plus qu'à grimper jusqu'à une ouverture puis utiliser un ascenseur... Tout simplement.
C'est quand même vachement simple, la vie, non ?
